Le Soudan

Publié le par ty mor

 

ty mor (76)A la mi avril, on arrive au Soudan. A terre, c'est le désert de Nubie, en mer, c'est la côte des marsas. Une marsa, c'est une entrée de rivière qui ne coule plus: il n'y a plus de pluie dans cette région. On pénètre en terre de plusieurs kilomètres. Il faut arriver au plus tard en début d'après midi pour ne pas entrer avec le soleil en face. Il faut trouver la passe au milieu du platier de corail, et trouver le chemin au milieu des patates de corail. On trouve jusqu'à un mile de différence entre ce que donne la carte et la réalité. Quand le bateau est mouillé, au milieu du désert, c'est sublime:du pont du bateau, on regarde les poissons tourner autour de l'ancre jusqu'à une dizaine de mètres de profondeur, poissons de toutes couleurs, raies bleues... De temps en temps, un troupeau de chameaux passe le long de la berge. Dans chaque marsa, un couple d'aigles au nid impressionnant, parfois deux mètres de hauteur. Contrairement à l'Égypte, plus aucun contrôle.

On est dans marsa Gwilaib depuis trois jours. C'est une marsa où vivent encore quelques dugongs. Dès la tombée de la nuit, on entend de grands bruits dans l'eau, parfois très près du bateau: est-ce que se sont les Dugongs? On essaie d'éclairer avec la torche, on ne voit jamais rien. On ose à peine se baigner. Enfin, juste après le lever du jour, on voit: un banc de poissons entier qui saute hors de l'eau. Des requins ou autres prédateurs cherchent leur repas. On passe notre temps à ramasser des coquillages, approcher les chameaux, et à lire. Le quatrième jour, six heures du matin, des cris d'enfants. On prend notre café, on embarque dans l'annexe et on va voir. On charge le sac à dos de bonbons et de quelques boites de médicaments. Une tribu a fait arrêt à un kilomètre de nous. Les hommes et les enfants sont en djellaba, les femmes sont habillées de vêtements très colorés, voilées seulement le bas du visage. La plus ancienne a une grosse boucle en or dans une narine. Ils élèvent des chèvres et des chameaux et vivent en suivant le troupeau. Ils profitent du bord de mer pour chercher des coquillages et pêcher. Ils viennent à notre rencontre. Hélas, aucun ne parle anglais, seulement arabe ou dialecte. On distribue les bonbons, quelques stylos. On donne quelques boites de cachets contre la douleur et la fièvre au chef de la tribu. Aussitôt, il en donne à une jeune femme et à un bébé qui ont de la fièvre depuis deux jours. Ils pensaient que le bébé allait mourir. Quelques heures plus tard, le bébé va mieux. On est monté presque au rang de leur dieu. Le chef m'offre, solennellement, son épée. L'épée, c'est la fortune de la tribu. Quand le chef part en ville, il met la djellaba blanche immaculée et l'épée à sa ceinture. J'accepte le cadeau, on ne peut pas refuser, mais je suis très gêné. J'admire cette épée, puis j'explique au chef que les armes sont interdites à bord. Je risque de me la faire confisquer par la douane. Il est préférable qu'il la garde. Deux enfants d'une dizaine d'années sont aveugles: ils jouent, se baignent comme les autres, en se guidant aux voix. On nous installe sur une couverture à l'ombre de la falaise. Le pain cuit déjà dans le sable. La femme du chef torréfie quelques grains de café dans une petite gamelle avec un manche en bois, sur quelques braises des rares branches trouvées aux alentours. Ensuite, les grains sont mis dans le pilon, broyés, mis dans la cafetière en aluminium, de l'eau du bidon de vingt litres, et chauffé sur les mêmes braises. On nous sert le café dans un tout petit verre, très sucré. Heureusement que notre organisme s'est habitué, tout l'hiver, alors que l'on buvait l'eau du robinet partout où l'on passait. Le pain est sorti du sable et coupé en morceaux. Le chef pêche un beau poisson. On est invité à manger le midi. On retourne au bateau chercher des habits d'enfants, des médicaments et des babioles pour faire des cadeaux. Quand on revient, le riz est en train de cuire: dans une grande gamelle, deux oignons émincés, du riz, de l'eau, du sel, et le poisson. On est servis en premier, tout le monde nous regarde manger. Pas de fourchette, on mange avec les mains. Le pain est bon, pas bien levé, mais, à notre grande surprise, pas un grain de sable. Le chef regarde mon masque avec envie: le sien est percé; il cherchait des coquillages dans les trous d'une patate de corail, un gros barracuda était embusqué et l'a mordu au visage. Les crocs sont entrés dans une joue et dans une arcade sourcilière et le masque a été percé. Je finis par lui en faire cadeau.

ty mor (74)

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